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Produits bio: Menaces sur les contrôles !

29/09/2019

La surveillance des produits issus de l’agriculture biologique repose sur un double contrôle : avant la commercialisation par des organismes certificateurs privés et après la mise en vente par les inspecteurs de la DGCCRF (Direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes). Mais ces derniers pourraient voir leur rôle amoindri. Une note interne que nous avons pu consulter retire aux agents de la Répression des fraudes la mission d’enquêter en cas de découverte de résidus de pesticides dans des aliments bio. Cette fonction serait désormais confiée aux organismes certificateurs privés qui ont des pouvoirs d’investigation et de sanctions beaucoup plus limités.

La surveillance des produits bio sur le marché français repose actuellement sur un double contrôle. Le premier, avant leur mise sur le marché, est réalisé par des organismes certificateurs privés. Le second, après leur mise en vente, est accompli par les agents des services de l’État en charge de la répression des fraudes. Cet équilibre est aujourd’hui partiellement remis en cause, alors même que la demande de garanties des consommateurs concernant le bio est très forte. Une enquête, publiée en février 2019 par l’Agence bio, révèle en effet que « 51 % des Français déclarent manquer d’information sur l’origine des produits biologiques. Ils sont 63 % à avoir cette impression quant à la réglementation et le contrôle en agriculture biologique ».

De nouveaux risques !

Côté pile, il y a la position officielle de l’État, qui rappelle l’importance de ses missions de contrôle des marchés bio (1). Côté face, il y a la pratique, pas vraiment en adéquation ! Voilà deux mois, une instruction interne a, en effet, restreint le champ d’action des agents de la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) dans la filière du bio (lire les documents en encadré). Jusque-là, en cas de détection de résidus de pesticides dans les prélèvements qu’ils avaient effectués, les inspecteurs de cette administration devaient mener une enquête auprès de l’opérateur concerné. Surprise, dans la nouvelle version, de mai 2019, du plan de contrôle de la filière biologique par ces services de la répression des fraudes, ce rôle « d’investigation » a été transféré aux organismes certificateurs. Avec les conséquences induites… Les contrôleurs de ces structures privées peuvent sanctionner une fraude par un déclassement du lot ou un retrait de l’habilitation en agriculture biologique mais ils ne sont pas assermentés, contrairement à ceux de la DGCCRF. Ils ne disposent pas, notamment, de leurs pouvoirs d’enquête élargis (injonctions, saisies, perquisitions sur autorisation du juge), ni de la possibilité de prendre des mesures de police administrative (amendes, procès-verbaux, assignations en justice). Au moment où les ventes et les importations d’aliments issus de l’agriculture biologique explosent, on s’interroge sur la raison de priver la surveillance des marchés bio de ces moyens dissuasifs.
Côté Inao (Institut national de l’origine et de la qualité), en charge de l’agrément des organismes certificateurs privés, on reconnaît que la coordination des contrôles entre la DGCCRF et l’Inao est en discussion, mais que rien n’a encore été acté entre les deux entités concernant les enquêtes sur les résidus de pesticides. La direction de la répression des fraudes n’a, quant à elle, pas donné suite à notre demande de précisions… Reste que le timing de cette nouvelle mesure n’est guère idéal : la suppression du rôle d’enquête des agents de la répression des fraudes intervient au moment où le dispositif de visites des organismes certificateurs dans les exploitations bio doit être allégé. Le règlement européen, qui entre en vigueur en 2021, prévoit que ces contrôles annuels deviennent biennaux si aucun manquement n’a été constaté pendant trois années consécutives.

Des faiblesses existantes !

Un double allègement des contrôles que certains producteurs bio redoutent… D’autant que des faiblesses dans leur organisation peuvent déjà être relevées, notamment au sujet des résidus de pesticides ou de l’entrée sur le marché européen des produits importés. Certains d’entre eux soulèvent le fait que l’analyse quantitative des résidus de pesticides diffère selon les contrôleurs (comme, d’ailleurs, les sanctions, en cas de découverte de résidus). La DGCCRF et les organismes certificateurs continuent d’utiliser des méthodologies différentes pour les mesurer. Pour l’Inao, cependant, ce point n’est pas problématique : « Les différences de méthodologie concernent des aspects d’organisation mais, en aucun cas, de qualité des contrôles. En outre, dès 2020, l’ensemble des méthodes d’analyses seront harmonisées en France. » Plus gênante est la question du budget affecté aux prélèvements pour l’analyse de résidus de pesticides. Alors que le nombre de produits bio à surveiller augmente considérablement, l’évolution des effectifs d’inspecteurs, en particulier de la DGCCRF, ne suit pas la même courbe. Par exemple, l’État français a prévu, pour 2019, la réalisation de 500 prélèvements pour la recherche de résidus de pesticides sur les aliments d’origine végétale importés. Ils sont effectués de façon aléatoire sur les denrées arrivant dans les ports et aéroports français. Ce chiffre a grimpé de 20 % par rapport à l’année dernière, afin de s’aligner sur la hausse des importations… Mais sans renfort des équipes existantes. Aujourd’hui, dans les principales zones d’entrée en France des produits importés – les ports de Marseille (13), Bordeaux (33), Saint-Nazaire (44), Le Havre (76), Dunkerque (59), les aéroports de Roissy (95), Orly (94), Lyon (69), Bordeaux –, les contrôleurs de la DGGCRF en charge de la surveillance des aliments bio d’origine végétale sont, en moyenne, entre 7 et 10. Mais le temps qu’ils peuvent consacrer au contrôle du bio ne représente souvent pas plus de 25 % de leurs activités. À noter qu’un autre point du contrôle à l’import pose toujours problème : la détection d’OGM et d’additifs. Selon plusieurs agents de la répression des fraudes, leur présence dans les produits bio, lors de leur arrivée dans l’espace européen, n’est jamais contrôlée, contrairement à celle des résidus de pesticides, et ce pour des raisons financières. Le prix d’un test pour déceler ces substances sur un lot s’élèverait à environ 800 €. L’État français n’en aurait apparemment pas les moyens !

CHERCHER LES RÉSIDUS DE PESTICIDES !

Mai 2019, les pouvoirs d’enquête des inspecteurs de la répression des fraudes subissent une sacrée cure minceur. En janvier 2019, on peut lire dans le document interne qui organise leur contrôle (instruction TN 264LA - plan de contrôle de la filière agriculture biologique) : « En cas de détection d’un pesticide […], il conviendra de vérifier auprès de l’opérateur concerné si la présence est due à une pollution dite environnementale […] ou si les produits en cause ont fait l’objet de traitements interdits. » Une nouvelle version change la donne en cours d’année. Le document, envoyé aux agents en mai 2019, indique cette fois : « En cas de détection d’un pesticide […], il conviendra d’informer immédiatement l’organisme certificateur de l’opérateur responsable de la mise sur le marché […], afin que ce dernier puisse entreprendre des investigations et renseigner dans les meilleurs délais la DDPP (la répression des fraudes, ndlr). »

IDENTIFIER L’ORIGINE DES ALIMENTS !

Aujourd’hui, les consommateurs peuvent, en principe, connaître l’origine de la matière première des aliments issus de l’agriculture biologique. Tous les produits bio préemballés commercialisés en France doivent, en effet, impérativement porter le logo bio européen (la « feuille » européenne). L’origine est indiquée en bas de l’étiquette, à droite. Juste au-dessus est inscrit le code de l’organisme certificateur, OC, qui permet, si on le souhaite, d’avoir accès à son nom en consultant la liste des codes OC sur le site de l’Agence bio (agencebio.org). Problème, de nombreux opérateurs mentionnent aujourd’hui comme origine : « Union européenne/Non Union européenne » ! Ce qui revient purement et simplement à supprimer l’information. En pratique, si vous désirez privilégier les aliments biologiques français, vous pouvez vous tourner vers le label Bio Cohérence. Les produits sont tous certifiés issus de fermes hexagonales 100 % bio. Repérez aussi le label Nature & Progrès (les coordonnées de tous les producteurs sont consultables en ligne : natureetprogres.org/lannuaire-des-professionnels), qui privilégie les circuits courts et une agriculture paysanne.

De plus en plus de produits mentionnent l’origine UE/non UE. Insuffisant !

LES RÈGLES QUI CHANGENT SELON L’ORIGINE !

La réglementation bio européenne interdit les produits phytosanitaires de synthèse. 

Mais les producteurs ont seulement une obligation de moyens et non de résultats, pour ne pas pénaliser d’emblée les contaminations accidentelles. Et si la présence de résidus peut donner lieu à des mesures allant du déclassement du lot au retrait de la certification bio, la sanction éventuelle est à l’appréciation des contrôleurs.

En conventionnel, la règle varie selon l’origine du produit :

Pour un produit français : la réglementation européenne et les autorisations de mise sur le marché spécifiquement françaises, qui peuvent être plus sévères, s’appliquent. 

Pour un produit européen : la présence de résidus de pesticides interdits en France mais autorisés dans le pays européen en question est possible, en respectant la limite maximale de résidus (LMR) européenne fixée pour la culture donnée. 

Pour un produit extra-européen : la législation européenne s’applique. Si une substance active n’est pas autorisée en Europe, sa présence doit être inférieure à une LMR par défaut de 0,01 ppm (état de trace). 

À noter : Dans certains cas, une LMR européenne « import » peut avoir été établie pour des substances non autorisées en Europe. C’est le cas pour le diazinon retrouvé dans un ananas. Au-delà de ces seuils, le produit est interdit en Europe et, donc, en France.

(1) Sur le site du ministère des Finances, à la page consacrée à la DGCCRF, on peut lire : « L’une de [ses] missions est de contrôler le respect des exigences réglementaires qui garantissent la qualité biologique des produits et d’éviter les fraudes. Cette mission est d’autant plus importante que la consommation de produits issus de l’agriculture biologique connaît une hausse historique. »

Élisa Oudin  Que Choisir

 

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